Veronica ou la mort comme seule issue au traumatisme sexuel ?

Il y a quelques années j'ai enfin posé des mots sur ce qui m'était arrivé petite fille et sur ce climat constant dans lequel j'ai vécu pendant 45 années.

INCESTE.

Et depuis ce n'est pas que je vois des incestes partout, mais je trouve que le cinéma d'épouvante et plus particulièrement celui abordant le thème de la possession est ultra propice à servir de réceptacle et de métaphore à l'INCESTE. J'en avais déjà causé dans cet article sur L'exorciste et puis aussi dans celui-là sur le film El habitante. Veronica je l'avais découvert il y a quelques années, j'y avais décelé pas mal de choses "gênantes" (comprendre : malaisantes pour Bibi) et ayant eu l'occasion de le voir sur grand écran récemment, je ne peux m'empêcher de penser que l'INCESTE est fortement sous-entendu dans ce film.

Resituons le film dans le contexte : Veronica a 15 ans. Malheureusement elle ne peut pas profiter de la vie comme toutes les jeunes filles de son âge, elle ne peut pas aller danser en boîte ou flirter avec des garçons parce qu'elle doit s'occuper de son petit frère et de ses deux sœurs pendant que la mère travaille dans un café à Madrid. On suppose qu'elle tient ce rôle très pesant depuis la mort de son père, père qu'elle essaie un jour d'éclipse, de contacter via une planche ouija... Il ne faut pas être un grand connaisseur de film fantastique pour savoir que le Ouija est très périlleux dans son utilisation (L'exorciste démarre après que Regan l'ait utilisé) et que forcément les choses vont très mal tourner pour Veronica...

Mais les choses n'ont-elles pas déjà mal tourné pour elle ? Il est franchement difficile de voir l'histoire de cette toute jeune fille emprisonnée, mal dans sa peau, déçue en amitié, rêvant d'une autre vie en regardant de l'autre côté de l'appartement sa voisine qui elle semble vivre sa vie d'ado... Et pendant tout le film le calvaire va empirer, jusqu'à un final étouffant, écrasant, à l'image de ce tableau de prédateurs traquant leur proie. Tout comme le cerf elle ne va pas y échapper...

Pourquoi penser à l'INCESTE et au trauma sexuel justement ? Nombre de scènes, d'images, de métaphores et de propos pour moi, laissent planer le doute. Il y a ce cauchemar épouvantable où Veronica sent la présence de son père et voit son fantôme complètement nu et se retrouve plaquée sur son lit par des mains décharnées baissant sa culotte... Il y a ce petit garçon souffrant d'énurésie qui va lui aussi entendre son père lui parler la nuit, et Veronica lui intimant l'ordre de ne surtout pas l'écouter et de l'appeler très fort au secours si cela arrive, Vero Vero Vero Vero...

Il y a cette scène incroyable avec Sœur Morte (Narcisse de son "vrai" nom) qui lui raconte s'être crevée les yeux pour ne plus jamais voir mais continuer à voir malgré tout car la mémoire et les autres sens reviennent sans cesse la tourmenter... Il y a cette mère insensible, écrasée, n'écoutant pas sa fille qui l'appelle sans cesse, qui lui crie désespérément à l'aide et qui ne veut pas écouter ce qu'elle a à lui dire, et qui en plus la force à devenir "femme" (avec des menstruations, scène cauchemardesque également de cette main maternelle glaçante écrasant son utérus).

"Maman quand tu es là il ne vient pas me voir"

Elle lui refusera sa présence rassurante.

Il y a ces lits corrompus, pourrissant dans des ombres maléfiques...

Il y a cette perpétuation de la violence avec Veronica qui s'en prend à son frère et à ses sœurs.

Il y a ces images d'une jeune fille avec des bagues aux dents, la bouche anormalement distendue, criant sans que personne ne l'entende.

Pour moi ça commence à faire beaucoup.